Archives Mensuelles: juillet 2018

DERNIÈRE BALLADE AU PRESBYTÈRE

Le jour se lève à BELLECOMBE. Un premier rayon de soleil se pose paresseusement sur l’ancien cadran solaire du presbytère, vestige de l’époque où l’on regardait ce mur pour y lire l’heure. Bientôt la façade du bâtiment sera inondée de lumière, la voute de pierre d’une très ancienne porte aujourd’hui murée, un « œil de bœuf » sculpté dans le calcaire, un crépi à la chaux effrité, rien de très exceptionnel, un bâti sans âge, au passé lointain et méconnu… Pourtant, à la faveur de cette aube radieuse, pour qui bien-sûr est observateur, intéressé, curieux, on voit nettement apparaitre sculptées dans la pierre une date et deux lettres : 1667 – J. B.

Un groupe de randonneurs s’approche. Les souliers raclent les gravillons de la route. La montée est rude depuis le bourg, les chemins de traverses dans la forêt de châtaigniers sont raides. Ils ont émergé du couvert boisé dans une prairie sous les remparts délabrés de l’ancienne forteresse. Encore un petit effort et les voilà dans le hameau, ils passent devant le four à pain, aperçoivent l’ancienne école et emprunte un chemin très pentu permettant d’accéder au site historique de BELLECOMBE. A leur gauche la montée vers l’ancien château, aujourd’hui en ruine, mène au petit cimetière où reposent les gens d’ici, l’église solidement ancrée à la roche, son clocher massif appuyé sur un porche ayant accueilli tant de fidèles, de couples à marier, d’enfants à baptiser et bien-sûr tant de défunts rejoignant leur dernière demeure. En face un édifice plus récent, un ancien hôtel désaffecté qui connut l’affluence. A leur droite une esplanade et l’ancien presbytère… Le but de leur visite.

Quand ils ont appris la décision municipale de vendre le presbytère de BELLECOMBE, nos marcheurs ont décidé cette randonnée entre amis comme un pèlerinage dans les pas de leurs ancêtres.  En chemin, les anecdotes n’ont pas manqué de s’échanger :

On se remémorait LUCIEN qui fut contraint, enfant, de venir à l’école ici plutôt qu’au village, à pied été comme hiver, pour punir son indiscipline… Sacrée pédagogie !

Il y avait ces gosses du hameau qui découvrirent en apprentis archéologues les vestiges d’un escalier de pierre en colimaçon ayant probablement desservi un ancien donjon… Les parents inquiets ont dû mettre un terme à la vocation de découvreur des bambins et cacher les pelles et les pioches !

Un jour, les jeunes d’ici ont décidé de bâtir une salle festive adossée à la façade du presbytère pour y organiser des fêtes. Ils ont constitué l’association « Les amis du GRANIER » et consacré les bénéfices générés par les bals et les kermesses à l’organisation de voyages en autocar pour que les gens du pays découvrent les beaux coins de France et d’ailleurs, créant ainsi un formidable lien social entre les générations, dans l’esprit montagnard.

Les anecdotes foisonnent entre nos randonneurs :

Celui-là se rappelle une soirée cinéma dans la salle du presbytère qui avait réuni la quasi-totalité des habitants du hameau, lorsqu’une coupure de courant provoquée par un orage est survenue, il a fallu raconter la fin du film… On avait inventé le ciné/conte !

Une soirée conte justement, est restée gravée dans la mémoire des artistes, venus de Paris nous divertir et qui furent enthousiasmés par notre accueil, la chaleur humaine, le succès rencontré… Notre petit vin blanc aussi !

L’un des randonneurs dit : « J.B. sont les initiales d’un curé de BELLECOMBE exceptionnel du 17ème siècle : Jean Barnier. Cette bâtisse lui doit beaucoup. Les bases de ce bâtiment sont médiévales. On retrouve des commentaires sur l’état du bâtiment et son évolution au fil des siècles dans les archives. Les visites paroissiales faisaient l’objet de compte-rendu à l’époque où l’on gérait le patrimoine comme une richesse commune et non pas comme une dépense inutile !».

« Lorsque j’étais élu » dit un autre « On avait entrepris des démarches auprès du service des bâtiments de France, on nous avait conseillé de restaurer en priorité l’église ce qui fut fait, toiture et gros œuvre, on avait aussi entrepris de juguler la ruine des remparts en faisant intervenir des cordistes pour dévégétaliser la muraille et installer des renforcements en bois dans les ouvertures ».

Il y avait eu ce formidable projet de maison du tourisme avec au rez-de-chaussée deux salles d’exposition consacrées l’une aux ours des cavernes dont les ossements avaient été découverts dans une grotte sous le mont Granier, l’autre à la centrale hydroélectrique du Cernon, on aurait accroché ici la magnifique exposition sur le château réalisée par « l’atelier des dauphins ». A l’étage on aurait aménagé une salle festive pour les familles et les associations. A l’extérieur, un espace scénique pour les manifestations, on envisageait même la création d’un jardin de fleurs alpines… Le projet avait été dessiné par une étudiante en architecture, elle avait même construit une maquette… C’était au temps où la commune avait des projets ! Tout cela doit certainement prendre la poussière dans le grenier de la mairie !

L’amertume dominait dans les propos des randonneurs. Ce village et ses hameaux devaient-ils abandonner définitivement leur identité ? La vente du patrimoine communale était-elle inéluctable ?

Désabusé, l’un de nos randonneurs lançât : « Des tas de pierre comme ça on en a d’autres à vendre ! Le vieux clocher entièrement rénové et l’église qui n’accueille plus aucune activité… Il y a aussi le presbytère de La Ville puisque le service petite enfance va bientôt déménager dans la nouvelle garderie ! »

Un autre renchérissait : « Et l’ancienne gare du tramway, on peut la fourguer aussi dès que les pompiers intègrent leur nouvelle caserne… Et le restaurant scolaire… On pourra faire manger les écoliers dans le nouveau restaurant de la place de la mairie… Pour faire marcher le commerce ! »

Un troisième entrant dans le jeu : « Il y a bien la salle de danse et le Dojo mais bon… Il y a des clubs à Pontcharra ! Ils peuvent bien se bouger les gens ! »

Le groupe avait bien compris la plaisanterie et tous se mirent à inventorier en raillant tout ce que la municipalité pourrait encore bazarder pour enrober quelques routes et satisfaire son électorat. Tout y passa : Prés, forêts, chemins vicinaux, parcs et jardins, bâtiment de la bibliothèque, la place de la mairie elle-même pourrait être lotie pour y construire un immeuble !!!

Le délire prit fin faute de bien communal à vendre. Nos randonneurs se tournèrent une dernière fois vers l’ancien presbytère et sa longue histoire humaine ; ils soupirèrent tristement comme pour un dernier salut. Retournant sur leurs pas, ils rejoignirent la forêt de châtaigniers et cette petite clairière propice à la dégustation d’un solide casse-croute. Ils s’installèrent dans l’herbe, déballèrent boissons et victuailles et commencèrent alors, entre rondelles de saucisson, morceaux de fromages et gobelets de vin, à refaire le monde… Ou plutôt à imaginer ce qu’aurait pu devenir notre village s’il avait su préserver son environnement et son patrimoine. Peut-être, va savoir, l’un de ces beaux villages de France tant appréciés et tant visités, attirant touristes et nouveaux résidents ?

La dure réalité de l’incompétence régnant en mairie les rattrape. Avec la vente du presbytère de Bellecombe la commune perd une chance de développer la fréquentation touristique du lieu. Avec la décision de dénoncer le statut d’espace naturel sensible du lac de BEY le vignoble perd une belle image de marque. Comment peut-on décemment prétendre dynamiser le village, relancer les commerces et dans le même temps brader le patrimoine bâti et naturel ?

DAUPHINE OU DAUPHIN ? (Conte pour adulte)

« Enfin l’été !» se dit l’homme musant sur le chemin, ses belles galoches noires claquant sur les cailloux : « Après un vrai printemps, les arbres en fleurs et toutes sortes d’oiseaux qui chantent ! L’été s’annonce beau et chaud dans notre petit royaume ! »

A la main, il tient une épaisse sacoche de cuir à la forte poignée, il ne peut s’attarder, son devoir l’appelle au château d’où l’on a sollicité sa grande compétence en médecine humaine.

Las des charlatans en tous genres, les gens de la cour (Les matrones… Lire de précédents contes…) lui avaient adressé un messager à cheval, un guerrier farouche, chargé de signifier à travers de grosses moustaches rousses l’impériosité d’accourir au chevet de la reine SARDINE, la souveraine du lieu (Là aussi, lire de précédents contes… Faut bosser un peu !).

Notre piéton, médecin de son état, diplômé de la plus ancienne faculté du continent était si compétent que sa réputation traversait les frontières. Les gens l’admiraient et s’en méfiaient aussi… Son immense savoir en était la cause… Il avait sauvé du trépas tant d’illustres mourants et soigné gracieusement tant de nécessiteux que c’en était presque étrange et miraculeux. Il en est ainsi pour tous les grands hommes de science, certains même ayant péri sur un bûcher pour sorcellerie, tant le commun des mortels est-il apeuré par ce qu’il ne comprend pas !

Le messager à moustache avait dit : « La reine SARDINE souffre d’une fort mauvaise humeur entrainant un ballonnement proéminent situé au niveau de la ceinture. Son caractère, d’ordinaire autoritaire, s’en trouve encore plus volcanique, proche parfois du déchainement pour ne pas dire de la démence… Signes certains d’une mauvaise santé… Aucun dialogue n’est possible tant sa majesté invective à tout va, engueule à qui mieux mieux, explose en maintes colères… La cour n’en peut plus et compte déjà plusieurs défections de matrones lesquelles préfèrent la réclusion ou l’exil… Il lui prend aussi d’incroyables envies, des fraises en hiver, des fringales la nuit, elle se gave puis vomit ! …».

Le docteur en fin diagnostiqueur s’était risqué : « Ne serait-elle pas enceinte ? »

Le messager ébranlé par la question : « Sous entendez-vous qu’un vicieux sujet ait immiscé son phallus entre les augustes cuisses de notre chaste souveraine sans qu’elle n’y consente ? »

Le médecin : « Peut-être y a-t-elle consenti ? »

Le messager soudain cramoisi : « Tudieu ! Vous n’y pensez pas ! Cessez-là ces propos infamants ! Notre souveraine a des devoirs et une destinée divine, elle ne peut copuler qu’avec de nobles personnes dénuées de mauvaises manières, elle ne peut enfanter qu’avec l’héritier d’un royaume voisin… Certes elle a tout pouvoir dont celui de bannir ses contradicteurs et d’ostraciser ceux qui lui feraient de l’ombre mais toute mésalliance lui est interdite par la loi clanique ainsi que tout ébat coupable… C’est au sein du clan qu’elle doit s’accoupler sans aucun risque de métissage ! »

Le médecin soucieux de calmer la brute dit alors : « Je me rendrai dès demain au chevet de la reine SARDINE afin de l’ausculter »

Le cavalier/messager/moustachu se tût, paru pensif et s’en fût sans que l’on ne sût à quoi il pensait !

Voilà pourquoi, le lendemain dès potron-minet, notre homme de science chemine en sifflotant en direction du bourg. Il ne se presse guère. La réputation de la reine SARDINE en est la cause. On dit que cette souveraine est plus prompte aux éclats de voix qu’aux éclairs de génie. Elle dirige un petit royaume avec une cour composée de matrones. Toutes sont d’anciennes commerçantes ayant vécu de différents commerces, poissonnerie pour la reine, casseroles pour cette matrone, ficelles pour une autre, il en est même une ayant vécu de ses charmes mais la décence nous empêche ici de la montrer du doigt. Elles furent portées au pouvoir par acclamation (Là aussi lire d’anciens contes). Ce petit monde mamelu et fessu régnait depuis, sans partage, sur les lieux tenant la population sous la coupe d’un odieux triage : « Ceux du clan et les autres ! » En clair « Ceux qui sont d’accord et se taisent ! Ceux qui ne le sont pas et s’en vont ! ». Assurément des calomnies… » se rassure-t-il intérieurement pour se donner du courage.

Il traverse un faubourg misérable constitué de masures adossées aux remparts d’une forteresse comme pour en chercher la protection. Le voici parvenu devant la lourde porte du château. Il cogne du poing plutôt qu’il ne frappe du doigt pour se faire bien entendre. Une tronche grimaçante apparait au créneau surplombant le porche d’entrée : « Kékeusè ?» hurle une bouche tordue et salivante. Les gens d’ici éructent, en effet, un langage dont l’accentuation empreinte d’agressivité en complique la compréhension. Le toubib s’annonce. Diverses portes s’ouvrent sous autant de porches. Il est enfin introduit auprès de la reine afin de vérifier si elle ne fut introduite elle-même !

La reine SARDINE, perchée sur des cothurnes, descend majestueusement de son trône doré, elle s’approche très près du médecin d’une démarche de tragédien grec pour lui confier d’un souffle : « Docteur je souffre de mauvaise humeur depuis que ma taille s’élargit et que mon ventre s’arrondit… Je crains d’avoir fauté et ne puis dire avec qui tant les nuits sont sombres et les couloirs du château fréquentés… Je suis minée, je vous le dis, par la crainte d’avoir manqué aux devoirs de ma lignée… ».

Figés au fond de la salle du trône, les godillots de la cour n’avaient rien entendu de la confession. Auraient-ils entendu quoique ce soit que cela n’aurait rien changé tant ils restaient cois et apeurés à chaque prise de parole de la vindicative altesse.

« Majesté ! » dit le médecin flagorneur « Rien de ce que vous faites ou dites ne peut être faute, vous êtes la reine, vos paroles et vos actes constituent des exemples, tout ce qui émerge de votre esprit influence la vie du royaume, ce qui est petit comme ce qui est grandiose. Êtes-vous sage et digne qu’il règne la concorde, faites-vous preuve d’iniquité que se propage la discorde… Mettez-vous un enfant au monde que vos sujets ne penseront qu’à faire de même ! »

La reine observe alors un temps de réflexion (ce qui ne lui ressemble guère) et dit : « Certes mon peuple risque de copuler fort ce qui l’empêchera d’ailleurs de me chercher querelle mais Il faudra bien pourtant que mon enfant connaisse son père ! »

Le scientifique, soucieux de conclure la consultation, dit alors : « Dauphine ou dauphin, quel que soit le genre de l’héritier du trône auquel vous donnerez vie, c’est au minois du poupon qu’on démasquera son géniteur ! ».

Ainsi fut révélée à ce petit monde ignorant l’existence du bagage génétique porté par chacun… Alors comme ça on possèderait les caractéristiques physiques et intellectuelles de ses ascendants… Du plus léger fétu au plus lourd fagot, du sac de plume à l’enclume, chaque être humain supporterait la charge que ses ancêtres lui ont léguée… Du bien comme du mal, du laid comme du beau on serait l’héritier ? La cour dans son ensemble sembla songeuse tant les gens de pouvoir et de peu de raison sont-ils convaincus de n’exister que par leurs seuls mérites !

La future naissance fût annoncée au son des olifants. Cent crieurs parcoururent la campagne pour propager la nouvelle. Dès cette révélation, la vie du royaume se trouva changée. On ne parlait plus que de la royale grossesse. On n’entreprenait que ce qui concernerait l’enfant : Un centre de secours ici pour soigner ses bobos, une crèche là pour qu’il puisse y jouer, turbines et moulins actionnés par l’eau des rivières pour produire la farine entrant dans la composition de friandises et de gâteaux… On n’organisait de festivités que destinées à l’enfance : Carnavals, soirées déguisées, chasse aux friandises… Il fallait, à tout prix, accueillir ce bébé, l’éduquer et le voir grandir dans les meilleures conditions.

On fit ainsi démolir quelques antiques masures du faubourg, bannissant leurs occupants au motif qu’ils étaient souffreteux, sales et guère entreprenant… « Moins l’héritier du trône croiserait ‘il d’enfants pouilleux, plus il aurait vue sur un avenir radieux » disait la reine. Le bourg s’en trouva embelli, les gens aussi étaient tous beaux, apprêtés, bien vêtus. Calèches et carrosses rivalisaient d’éclats dans les ruelles. Une nouvelle ère s’ouvrait pour le royaume, sans gueux (ils avaient migré !), sans contestations (elles étaient jugulées), à l’aune de la royale gestation.

Un phénomène curieux se produisit alors, les gens s’infantilisaient, riaient d’un rien, s’amusaient beaucoup, faisaient la fête et se querellaient aussi comme dans les cours de nos écoles : « Non je l’ai pas dit, c’est toi qui l’a dit » ou encore « C’est toi qu’a commencé, ça t’apprendra ! » et aussi « Toi ! T’es pas dans mon équipe ! » et même « Tu m’as même pas dit bonjour ! Ce n’est pas bien… ». Au château on se gavait de bonbons, on se les chipait parfois. Les problèmes posés par la gestion du royaume se réglaient par des jeux de hasard. Les matrones engageaient à cloche-pied d’interminables marelles… puis elles se lassaient et disparaissaient sans donner de nouvelles… Bref ! Il régnait une invraisemblable et joyeuse ambiance de cour de récréation ou d’aire de jeux. Est-il concevable qu’un royaume, si modeste soit-il, soit régie de cette manière ?

Plusieurs mois passèrent dans une frénésie prénatale… Et puis rien ! Les crieurs et les trompes restaient muets… Aucune annonce heureuse ne venait… Rien vous dis-je ! Le doute s’installa : Ce fameux docteur se serait-il trompé ? Aurait-il provoqué par une funeste erreur de diagnostic le chambardement dans le royaume ? Avait-il seulement ausculté la reine dont l’embonpoint pourtant s’amplifiait bel et bien, les portes du château suffisant à peine à son passage ! Mais toujours pas de dauphine et encore moins de dauphin !

A la force d’attendre et de ne pas comprendre, on s’impatienta et on renvoya le même chevalier messager à moustache quérir l’avis du médecin lequel administra la sentence suivante :

« J’ai cru bon, pour le royaume, de laisser croire à sa majesté qu’elle était enceinte. La reine SARDINE, habitée par ses frasques secrètes, se minait elle-même de ce qu’elle croyait être la conséquence de ses turpitudes… D’un enfant elle n’accouchera point… D’un meilleur régime alimentaire elle a besoin… Que cessent les enfantillages, que le joug du clan dominant ne pèse plus sur les épaules des pauvres gens et il viendra au monde un magnifique enfant qu’on nommera bonheur !». Ce qui fut dit sur un ton solennel.

Le cavalier/messager/moustachu parut à nouveau pensif… Il se retourna, enfourcha son cheval et s’en fut… Ne saurait-on toujours pas à quoi il pensait ?

Le docteur, sur son pas de porte, cria à l’adresse du soldat : « Mais à quoi pensez-vous ? » … Le cavalier arrêta sa monture, se retourna sur sa selle et dit : « Faut-il être un piètre scientifique pour laisser un bon peuple croire à une grossesse alors que tout n’était qu’enflure ! Aujourd’hui les gens de la cour s’observent et s’épient cherchant à deviner qui couche avec qui et qui a engendré qui ! La naissance de l’héritier du trône est tant attendue que toutes les activités du royaume lui sont consacrées… Il ne règne à la cour qu’immaturité, querelles et enfantillages… Et voilà qu’au lieu d’une dauphine ou d’un dauphin, il ne sera mis bas qu’étrons et fèces ! Je pense monsieur que vous êtes un médicastre ! Voilà ce à quoi je pense ».

Sitôt dit, le cavalier claqua des talons sur les flancs de son cheval et s’éloigna sur le chemin laissant derrière lui des volutes de poussière traversées par les rayons du soleil couchant.

Tout grand homme de science peut commettre des erreurs mais c’est bien à la force des expériences, des hypothèses et des doutes qu’un peuple se civilise. Gare aux sociétés arrogantes, guidées par la conviction inébranlable que seule la force compte !

 

Jean-François RICCI