Archives Mensuelles: février 2017

Participation citoyenne : la méprise !

La municipalité de Chapareillan invitant les habitants à une réunion publique intitulée « participation citoyenne » cela peut surprendre quand on sait le sort qui a été réservé, dès 2014, aux commissions municipales (suppression) et la maltraitance dont font l’objet les élus de la minorité (éviction, agressions). Cette réunion a pourtant bel et bien eu lieu en mairie, le 1er février dernier, en présence d’une quarantaine de Chapareillannaises et de chapareillanais.

L’initiative, en fait, vient de l’état. Le projet « participation Citoyenne » consiste à mobiliser des habitants à collaborer avec la gendarmerie pour plus d’efficacité dans la lutte contre les cambriolages et les incivilités, une sorte de suite officielle aux initiatives intitulées «voisins vigilants» devenues obsolètes.

Nous y voilà ! L’insécurité ! Thème favori de l’extrême droite, cherchant à répondre à la peur des habitants par quelques démonstrations de forces. Bruits de bottes et coups de menton sont-ils des réponses adaptées à une situation qui ne varie guère ? Rien en effet, aucune statistique portée à notre connaissance en tout cas, ne révèle que notre village glisse irrémédiablement vers l’insécurité. Il semble bien que les cris d’alarme proviennent de quelques quartiers pavillonnaires rendus propices aux cambriolages du fait de la hauteur des haies constituant un abri visuel pour les malfaisants et de la fragilité des édifices dont les constructeurs ont pu négliger la résistance à l’effraction.

Voici donc les murs de notre village bientôt dotés d’oreilles indiscrètes et nos persiennes entrouvertes dissimulant des regards inquisiteurs. « Rien de tout cela » affirment les gendarmes de Pontcharra chargés de la communication sur ce projet gouvernemental, bien conscients qu’en France, s’il arrive aux gens de vouloir embrasser les policiers dans la rue au lendemain des attentats, l’attitude face aux membres des forces de l’ordre reste plutôt méfiante ou craintive (réminiscences de l’occupation ? Reliquats de mai 68 ?), l’actualité dans sa tristesse montre en tout cas qu’un fossé reste à combler entre les citoyens et les détenteurs de l’autorité.

La réunion publique à cet égard a été très utile, la présentation du dispositif claire et explicite, une projection sur grand écran commentée par deux gendarmes avenants et sympathiques s’employant à rassurer les Chapareillanais présents. Il n’est pas question ici de surveillance ou de dénonciation mais plutôt d’améliorer l’échange d’informations pour plus d’efficacité. Pour cela, des référents seront désignés dans les quartiers, ils deviendront les interlocuteurs privilégiés des gendarmes pour toute information sur les vols, les incivilités mais aussi pour les signalements de faits étranges ou inquiétants.

Deux remarques :

Il me semble, en premier lieu, un peu déplacé de considérer sur le même pied d’égalité un cambriolage et une incivilité. Le premier cas constitue un véritable acte de délinquance pouvant donner lieu à des situations d’une grande gravité. Dans le deuxième cas, tout peut empoisonner notre vie quotidienne de la crotte de chien sur un trottoir jusqu’à la détérioration d’un abri bus, mais au titre de la loi il convient de différencier ce qui constitue une infraction d’un délit voire même d’un acte criminel et ne pas tout mélanger au risque de dramatiser inutilement le moindre fait.

En second lieu, les référents de quartier seront sélectionnés parmi des volontaires par madame le maire de Chapareillan dont on connait la propension à établir des critères très partisans lors de la constitution de quelques groupes de travail (surnommés «cousins/cousines ») ou la commission des impôts (surnommée elle «Papa, maman, la bonne et moi ! »). Nul doute que les futurs référents de quartier soient désignés selon l’appartenance au sérail ou l’allégeance au clan majoritaire !

L’ordre règnera-t-il ? L’ordre est-il seulement menacé ? :

Le nombre des cambriolages et des incivilités ont-ils tant augmenté qu’on s’emploie à mettre en œuvre ce dispositif, ce que très peu de communes dans l’Isère ont fait ? A cette dernière question, les participants à la réunion n’ont reçu qu’une vague réponse : « entre 10 et 15 cambriolages, nous n’avons pas les chiffres exactes ici… ». Ainsi l’état organiserait une campagne nationale consistant à créer un lien entre les forces de l’ordre et les habitants sans que ces derniers soient informés de l’évolution du nombre de cambriolages et en l’absence d’une analyse précise de la typologie des incivilités. Ces informations-là sont en possession de madame la maire et pourraient intéresser vivement les lecteurs du bulletin municipal. Ne serait-il pas plus utile de publier les statistiques sur ce sujet plutôt que d’entreprendre une désignation douteuse d’habitants référents dont le rôle réel dans la commune pourrait prêter à confusion ? Imaginez, en effet, un instant que vous soyez candidat volontaire, puis sélectionné, mettez-vous dans la peau de la personne qui recueillera toutes sortes d’informations sur ses voisins (les départs en vacances, les véhicules suspects, les lampes publiques vandalisées, etc.) et qui devra régulièrement communiquer avec les gendarmes afin de faciliter les enquêtes de voisinage… Vous y êtes ? Vous avez enfilé le costume de référent de quartier ? Quelles réflexions cela vous inspire-t-il ?

Rien de vraiment participatif et citoyen dans tout cela. Ma conviction, en effet, se place plutôt dans une réelle participation des habitants à l’organisation de leur vie collective. Le projet social des habitants, brutalement interrompu en 2014 par la majorité municipale nouvellement élue, était destiné à cela. Dés le plus jeune âge, les habitants devenaient acteurs de leur vie collective grâce à un accompagnement qui veillait à encourager l’initiative citoyenne, à différencier ce qui concerne la vie privée de ce qui constitue l’action collective. Les jeunes, dont on a supprimé le service, découvraient une pratique mobilisant la solidarité d’un groupe dans l’accomplissement de projets. Les différentes générations étaient conviées à des projets communs afin d’effacer les peurs et les conflits de générations. De tout cela on parle désormais au passé et voilà que la municipalité est rattrapée par l’expression des craintes des habitants de quelques quartiers pavillonnaires comme un effet « boomerang ».

Il faut bien que quelqu’un clame haut et fort que la brutalité avec laquelle la municipalité a mis fin au projet social des habitants, supprimé les commissions municipales et leur fonctionnement participatif, ostracisé la minorité municipale en l’écartant de tout travail communal et en tentant (vainement) d’évincer les élus minoritaires des commissions intercommunales, privilégié les associations «amies » et groupes sociaux considérés comme appartenant au clan, engagé une gestion municipale de boutiquier dépouillant les plus fragiles d’entre nous de la solidarité communale… Tout cela a un impact sur la sérénité de notre vie de village. Les pugilats opposant des élus à des habitants, les séances de conseil municipal se terminant par des invectives et des menaces, l’autoritarisme en vigueur en mairie, les mensonges sur les finances communales, tout cela ne concoure pas non plus à l’instauration de la paix sociale. Quand un village est divisé, que les minorités de pensée sont oppressées, que l’iniquité règne, c’est alors que le sentiment d’insécurité se développe. L’autoritarisme, je l’ai déjà dit dans ce blog, en est le responsable. Méditez cela alors qu’approche le troisième anniversaire de l’élection de cette majorité municipale. Cette initiative n’est-elle pas, tout bonnement, prétexte à tenter de donner une issue visible au travail obscur effectué on ne sait quand, ni où, ni par qui, aucune information n’étant donnée sur ce sujet, par l’un de ces fameux groupes de travail animé par le premier adjoint qui avait comme thème justement « les voisins vigilants »,  ?

En conclusion, cette anecdote : J’habite un chouette quartier de Chapareillan depuis plus de trente ans. Mes voisins sont formidables, chaque année, au mois de juin, on fait la fête tous ensemble, si les volets de cette voisine âgée ne s’ouvrent pas on s’inquiète, si le fiston de cet autre voisin fait des bêtises on le gronde, quand Pierre est en vacances Paul arrose ses plantes et ouvre ses volets, quand Jacques est malade tout le monde prend de ses nouvelles, offre ses services. Mes voisins sont comme une famille, ensemble on marie, on baptise, on enterre aussi. Mes voisins ne sont pas vigilants, ils sont prévenants, bienveillants, aimants… Mes voisins sont chouettes !

Jean-François RICCI