Archives Mensuelles: juillet 2015

Encore un petit conte rigolo

Au printemps les oiseaux sifflent, chantent et paradent pour attirer leurs belles.

Celui-ci, tout petit, jaune et gris, s’égosille tant et tant dans un long gazouillis qu’il en perd soudain la voix dans un « COUIC » pitoyable. Les oiselles se moquent et volent vers d’autres nids. Triste, honteux, dépité, il se pose alors sur le rebord de la fenêtre de la princesse, il semble bien que de petites larmes pointent au bord de ses petits yeux.

Tout doucement la fenêtre s’ouvre, une main fine s’avance et soulève le petit moineau prostré. La princesse pose alors sur la petite tête ronde du volatile un doux baiser. Le voilà ragaillardi, il s’envole, tourbillonne dans le ciel, effectue maintes prouesses aériennes comme pour remercier la princesse de son geste tendre.

Caché derrière une charmille, guettant la belle chaque soir, le valet de ferme se dit : « Ah si je pouvais voler et me poser sur le rebord de cette fenêtre, peut-être aurais-je moi aussi la chance de jouir d’une telle faveur… ». Le regard envieux et le nez en l’air, il admire le vol du piaf et reçoit soudain une fiente en plein milieu du front, PLOC !

A trop guetter sa belle, on risque un drôle de don du ciel.

Jean-François RICCI

Bulletin municipal de Chapareillan : ERRATUM.

Il ne pourra pas être dit que ce blog se cantonne dans la critique négative et le conte pamphlétaire.

Je rends ici grâce à la communication municipale de Chapareillan : très beau bulletin (Échos du Granier), éditoriaux de Madame le Maire simples et faciles à comprendre, nombreux articles informant sur la vie communale et mettant en valeur les services municipaux.

Que personne ne se pince ! J’écris cela en toute sincérité, n’en déplaise à celles et ceux qui privilégient le fond plutôt que la forme et rechignent à mettre leur communication au niveau intellectuel moyen des lecteurs et à la rendre accessible au plus grand nombre.

D’un média à l’autre, confraternellement et dans le respect des lecteurs du bulletin municipal de CHAPAREILLAN, afin que ce média de communication mette la véracité de l’information au même niveau que la qualité de sa publication, je me dois de suggérer à ses rédacteurs de publier les ERRATUM  suivants :

Dans le bulletin d’AVRIL 2015 sur la question du démarrage du marché du dimanche matin :

Il est écrit «à dater de mai 2015 »… Il fallait lire « Un jour peut-être ! »

Plus près de nous, en juillet, relatant le déroulement des feux de la ST JEAN :

Il est écrit «800 personnes ont assisté à l’évènement»… il fallait plutôt lire « 80 ! »

Et je passe sur «l’inauguration des nouveaux locaux de l’accueil des loisirs», bâtiments préfabriqués qui sont en place depuis belle lurette et qui étaient occupés par le « service jeunes » brutalement supprimé en 2014 !

Que les bulletins municipaux de qualité laissent aux correspondants locaux de la presse régionale l’exclusivité de l’approximation et de la désinformation !

François PIERI (pseudonyme préféré de certaines lectrices)

LE GRAND LIVRE

Dans ce petit pays lointain ( et imaginaire), depuis des temps immémoriaux, l’histoire se racontait de bouche à oreille, comme si l’écriture n’existait pas, ni le papier, ni les crayons, rien pour inscrire noir sur blanc les faits et gestes des sujets et des monarques. Aucun document ne conservait la mémoire fidèle du royaume. C’est du moins ce que l’on croyait, la suite de cette histoire prouvera le contraire.

Monarque éclairé et grand voyageur, le roi SPAGHETTI avait rapporté de Mésopotamie des tablettes en terre séchées par le soleil sur lesquelles apparaissaient des empreintes dessinées par la main de l’homme, qui racontaient des histoires : L’écriture cunéiforme. En homme de progrès, il souhaita qu’on adopte la même technique mais faute de terre assez argileuse pour fabriquer ces tablettes, on chercha un matériau sur lequel on pourrait également laisser des empreintes. Le peuple fut interrogé pour trouver une idée :

Une boutiquière du bourg, rendue opulente grâce au façonnage et au commerce de casseroles, proposa des plaques de tôle qu’on pourrait graver avec des poinçons… Trop lourd ! Trop dur ! S’oxydant aux premières pluies ! La proposition ne fut pas retenue.

Une seconde matrone, lavandière de son état, suggéra le réemploi de linge usagé et d’y tracer des signes avec du bois brûlé… Ne résistant ni au vent ni à l’eau ! Trop disparates entre lourdes vareuses et culottes légères ! Et parfois malodorant, la lessive n’existant pas ! Proposition également rejetée.

Un bûcheron, connu pour son âpreté au gain et son rude coup de hâche, apporta des planches de bois fraîchement sciées sur lesquelles il avait sculpté des signes… Trop technique, trop coûteux aussi, le bois étant le combustible le plus usité dans les chaumières !

Pas plus le bois que le tissu et que le métal ne purent convenir.

Un vieil ermite, retiré dans quelques grottes situées sous les falaises au-delà des forêts de grands sapins, intervint dans ce fourmillement d’idées (véritable foutoir comme c’est le cas chaque fois que l’on consent à consulter le peuple !). Il rappela d’une voix caverneuse (caractéristique des habitants des grottes) qu’il existait, dans un lointain passé, un grand livre constitué de mille feuilles fines et reliées dans une forte couverture ornée d’enluminures. L’ouvrage, véritable relique devenue le recueil de glorieux combats, de grands progrès techniques, d’avancées sociales et politiques, était conservé au château.

« – C’était un très grand livre » dit le vieil ermite « dont les feuilles légères et translucides, protégées par une épaisse peau en cuir, avaient été fabriquées avec des roseaux. On pouvait y écrire à l’aide d’une plume d’oie taillée en biseau, trempée dans un liquide coloré. Vin rouge, décoctions de diverses plantes, fientes diluées ne convenant guère, seul le sang humain permettait d’obtenir une écriture brune, bien nette et durable. C’est après de nombreux sacrifices qu’on abandonna cette pratique partant du principe qu’à ce rythme (un sacrifice humain par page !), il n’y aurait bientôt plus personne pour lire le grand livre pas plus que pour y écrire l’histoire.

Le grand livre tomba peu à peu en désuétude, on en oublia même son contenu (un peu comme la déclaration du Conseil National de la Résistance de nos jours ou la Déclaration des Droits de l’Homme… Enfin ce genre de trucs qui n’intéressent pas grand monde !). Il finit même par disparaitre lors du grand chaos tant le désordre fut grand ce jour-là » (Lire le Grand Chaos, février 2015).

Le roi SPAGHETTI ordonna la recherche de ce grand livre. Le royaume fut fouillé dans ses moindres recoins, les silos à grain renversés, les granges à foin retournées, les tonneaux vidés de leur contenu (ce qui ne constitua pas la pire des tâches). Rien… Rien de rien… Le grand livre était-il perdu à jamais ?

Un  jour enfin, un enfant aperçut sur le banc de la poissonnière du bourg un grand morceau de cuir servant de siège à ses augustes fesses… C’était la couverture du grand livre assurément ! On perquisitionna, on saisit l’objet, on fouilla la poissonnerie et ses réserves dans l’espoir d’y retrouver également les feuillets et avec eux l’histoire du royaume. Rien… Rien de rien… Toujours rien… On avait bien retrouvé la couverture du livre mais où donc étaient passées ses feuilles ?

Dame SARDINE, la poissonnière incriminée, fut arrêtée et virilement interrogée (elle en gardera à tout jamais, on le verra plus tard, un rude esprit de vengeance et d’animosité vis-à-vis des hommes de pouvoir !). Elle avoua que les feuilles de papyrus avec « pleins de dessins rigolos dessus» avaient servi à emballer truites, brochets et lavarets sur son étal. Chaque habitant ayant acheté du poisson avait eu entre ses mains une page de la chronique locale (à chaque poisson son potin, comme aujourd’hui les emballages de certaines confiseries)… Retrouverait-on le contenu du grand livre ?

L’enquête continua dans chaque foyer :

Chez l’un, les feuilles avaient servi, après déballage du poisson, à allumer le feu.

Chez l’autre, elles avaient été accrochées au clou du « Cacatin » pour essuyage intime.

Rares étaient les curieux qui conservèrent les documents pour s’en instruire d’autant qu’une forte odeur de poisson pas frais s’en dégageait.

Plus nombreux étaient ceux qui s’en instruisirent dans les « Cacatins » (lieu situé généralement au fond du jardin et où les odeurs ne comptent guère), s’essuyèrent le fondement avec le feuillet après lecture et allumèrent enfin le feu en dernier lieu, toute matière se révélant précieuse en ces périodes de grande disette, il était de bon ton d’en faire le plus grand usage. On entreprit alors d’interroger ces personnes afin qu’elles restituent le souvenir de leurs lectures… Est-ce l’obscurité du lieu ? Ou la position accroupie ? Ou les efforts qu’on y fit ? On ne recueillit que de vagues assertions et diverses digressions sans grand intérêt… Pas de quoi, en tout cas, reconstituer la quintessence de cet ouvrage séculier.

La légende prêtait au grand livre plus de mille feuillets relatant entre autres faits, les débats de la première assemblée populaire organisée par le roi SPAGHETTI (Lequel consultait ses sujets régulièrement), l’avènement de l’égalité d’accès à l’école pour tous les enfants (A l’époque où seule la progéniture des riches étudiait), l’état des comptes reflétant la gestion intègre et honnête du petit roi. Aucun des grands évènements importants de l’histoire du royaume ne figurerait plus jamais dans l’ouvrage ?

Le vieil ermite (encore lui) prit à nouveau la parole : « Il n’y a rien d’étonnant à ce que les souvenirs du peuple occultent les grandes pages de notre histoire commune, seuls les petits évènements les concernant directement les intéressent : les crottes de chiens devant leurs portes, les creux et les cailloux des chemins qu’ils empruntent, les ronces et les épines qui griffent le flanc de leur bétail… Le reste les indiffère ! »

Voilà pourquoi on décida d’élever la couverture du grand livre au rang d’icône. Elle fut encadrée et accrochée au mur de la salle d’apparat du château. Une vague empreinte sur la matière souple, ressemblant à deux sphères, rappelait l’usage qu’il en fut fait durant plusieurs années sur le banc de la poissonnerie locale. Par dévotion, on venait, une fois l’an, défiler devant ce morceau de cuir (comme devant un certain suaire à TURIN). C’était à l’occasion de la fête du solstice d’été, on s’y régénérait, on faisait de grands feux, on buvait, on dansait, on se réconciliait de toutes les fâcheries, on se lavait de tous les péchés. Aujourd’hui encore, dans ce petit royaume imaginaire, on fait la fête de la ST JEAN sans se douter de son origine : La méprise d’une poissonnière s’assoyant sur l’histoire de son pays!

Jean-François RICCI

Petit conte d’été interdit aux mineurs

Les longues soirées d’été sont propices aux émois amoureux.

Dans la fraicheur du couloir sombre d’un château, un petit page est agenouillé près de la porte d’une chambre à coucher. Par le trou de la serrure, le petit malotru voit, malgré l’obscurité, la princesse vêtue d’une courte chemise de lin se préparer pour la nuit. Lorsqu’elle se hisse dans sa couche, il entrevoit ses jambes galbées depuis la fine cheville jusqu’à la naissance de la cuisse. C’est pour ce bref instant qu’il est là tous les soirs dans l’espoir de voir plus haut encore. « Il guette au trou ! » disait-on à l’époque.

La princesse se couvre d’un drap brodé, penche son beau visage rond vers la lueur vacillante d’une chandelle et de sa jolie bouche ourlée en forme de cœur, en souffle la flamme. La nuit prend alors la belle dans ses bras pour un profond sommeil peuplé de rêves.

Oh combien de petits pages ont-ils souillé leurs haut-de-chausses au coucher des princesses dans les couloirs des châteaux ?